#Roms comment Valls a contourné le droit de vote des Européens

.Fin décembre l’inscription de Roms sur les listes électorales de Villeurbane (banlieue de Lyon) avait créé un certain buzz sur les réseaux sociaux. Parfois un commentaire de démocrate se réjouissant de cette étape franchie dans l’insertion républicaine d’une population discriminée, souvent des  messages haineux, de racistes s’indignant « bientôt ils auront des élus ! ». L’enthousiasme et le dépit étaient tous deux prématurés. La commission électorale de la célèbre cité rhodanienne (où est née il y a 30 ans,  la Marche dite « des Beurs » en réalité Pour l’Egalité et contre le racisme) a refusé d’inscrire les Roms sur la liste complémentaire des étrangers autorisés à voter aux municipales, tout en acceptant qu’ils votent pour les Européennes. La ville n’a fait, en réalité,  qu’appliquer une circulaire inique du ministère de l’Intérieur. J’ai fouillé dans le code électoral pour comprendre comment Manuel Valls a joué ce nouveau tour au Roms.

 

 

 

Lisons d’abord un article de Stéphane Cottin qui fut documentaliste juridique au Conseil constitutionnel et aujourd’hui chargé de mission Développement des systèmes d’information et Valorisation des ressources documentaires au cabinet du Secrétaire général du Gouvernement. Tout ça pour dire qu’il ne s’agit du blog d’un ignare en droit public.

 

Les SDF peuvent-ils voter?

 

IL faut qu’ils aient demandé le rattachement à une commune. Juridiquement, c’est simple, il faut être rattaché à un organisme d’accueil: les centres communaux d’action sociale et tous les organismes agréés. Énormément d’organismes caritatifs servent de boîte aux lettres –s’ils sont agréés par la préfecture, et qu’un SDF y est domicilié depuis six mois, cela vaut attestation de domicile. Le CCAS (centre communal d’action sociale) vérifiera si le SDF en question a six mois de domiciliation dans l’organisme d’accueil.

 

Ça c’est valable pour tous les SDF, (sous-entendu français). Donc regardons la partie relative aux citoyens ressortissant de l’UE (Union européenne).

 

Droit de vote des citoyens de l’UE

 

Un citoyen de l’Union européenne qui réside en France peut participer aux élections municipales et aux élections européennes dans les mêmes conditions qu’un électeur français. Pour exercer ce droit de vote, il doit être inscrit sur les listes électorales et remplir les conditions d’âge et de capacité juridique.

 

Il faut remplir les conditions suivantes :

 

être âgé d’au moins 18 ans,

 

habiter en France,

 

être ressortissant d’un pays de l’Union européenne,

 

et jouir de ses droits civils et politiques

 

Donc c’est simple « dans les mêmes conditions qu’un électeur français » donc un SDF européen doit être traité comme un SDF français. Eh bien non ! Le ministère a glissé une petite quenelle aux Roms, comme à tous les SDF européens qui vivent en France.

 

Lisons maintenant la circulaire du 25 juillet 2013 du ministère de l’Intérieur. Comme on l’a rappelé dernièrement à l’occasion des facéties ignobles de Dieudonné, une circulaire n’a pas d’effet contraignant. Elle est sensée rappeler la loi aux fonctionnaires et parfois aux élus qui doivent l’appliquer. C’est une explication de texte comme celle de M. Cottin Elle cite les mêmes textes que lui, et arrive aux mêmes conclusions sauf que.

 

Les dispositions applicables aux personnes sans domicile fixe ne sont pas applicables pour l’établissement des listes complémentaires en vue des élections municipales (l’article LO 227‑3 ne rendant pas applicable l’article L. 15‑1 qui a été introduit après le 26 mai 1998) mais le sont en revanche pour l’établissement des listes en vue des élections européennes.

 

Du coup les élus et techniciens chargés des listes électorales sont fixés. Mais si on va plus loin, on se rend compte du tour de passe-passe du ministère.   l’article LO 227‑3  ( de la loi du 25 mai 1998) précise que sont applicables « Les dispositions des articles L. 15 à L. 17, (…)  dans leur rédaction en vigueur à la date de publication de la loi organique n° 98-404 du 25 mai 1998 ». N’importe qui comprend que cela veut dire que l’on doit appliquer les dispositions dans l’état où elles sont, à partir du jour où une nouvelle loi est votée, mais ce n’est pas dit comme ça.  

 

En 2007, on modifie de nouveau le code électoral, en introduisant les dispositions propres aux SDF telles que M. Cottin les expose plus haut. On oublie de modifier l’article LO 227‑3 , qui devrait inclure les modifications demandés par les élus. C’est de ce vide juridique que le ministère s’est autorisé pour préconiser de ne pas inscrire les Roms. J’imagine le sous chef de bureau chenu ou le jeune énarque tout fier d’avoir trouvé cela.

 

Un autre ministre aurait pu recommander le contraire. Et à mon avis c’est attaquable au T.A.

 

Une réflexion sur « #Roms comment Valls a contourné le droit de vote des Européens »

  1. le sujet du droit de vote est très intéressant et surtout le fait que plusieurs candidats aient portés plainte; Hanotin (vPS Saint-Denis) a été débouté, et maintenant Brard porte plainte (Montreuil)…Mais du coup j’ai regardé la loi éléctorale de 2007, car cette histoire de circulaire quand même…. En fait c’est écrit dans la loi de 2007 en bas, de la page 36 :

    Cliquer pour accéder à INTA0700122C.pdf

    La circulaire la reprend, ce qui n’empêche pas de trouver ça pitoyable de faire une différence entre sans domicile stable( comme ils est noté dans le texte de loi) français ou européen, des lors que les européens ont le droit de vote pour les municipales et les européennes en France.

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